Tendances

Un pays peut-il être une marque ?

Le métier d’un publicitaire est de développer des marques. En les prenant toutes petites (comme Wieden & Kennedy avec Nike) ou déjà grandes (comme l’agence 72andSunny avec Axe) et en leur donnant un univers, un imaginaire propres. Philippe Lentschener avait déjà un long passé de publicitaire sur de grandes et belles marques comme Danone, Toyota, Procter & Gamble ou encore Bel quand on lui a proposé de travailler sur une marque un peu particulière, la marque France.

J’en vois déjà qui froncent les sourcils à l’idée que la France puisse être considérée comme une marque à l’instar d’un gel douche ou d’un paquet de pâtes. N’est-elle pas bien autre chose, cette France qui a vu naître nombre de philosophes, d’écrivains et de savants du siècle des Lumières, qui a fait sa Révolution à la stupéfaction du monde entier et promulgué la première Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen ? Bien entendu, la France c’est tout ça et bien plus encore mais dans un monde extrêmement concurrentiel, c’est aussi une marque. Les Anglais l’ont bien compris qui parlent de « Nation Branding ». Un pays a donc besoin aujourd’hui d’un discours, d’une image et de cohérence dans la façon de se présenter (c’est d’ailleurs pour garder le cap et maintenir cette cohérence qu’un publicitaire peut s’avérer utile, habitué qu’il est à construire des discours enrichissant la marque).

Quand l’Inde achète des Rafale, elle achète la technologie de l’avionneur Dassault mais aussi le savoir faire français en matière d’industrie et d’armement. Quand Franck McCourt rachète l’Olympique de Marseille, il achète aussi un pays qui vibre pour le sport (regardez tous les draps tricolores qui ont accompagné le beau parcours des français pendant le dernier Euro). La marque France est là, vivante, brouillonne parfois, brillante souvent. Elle n’est certes pas facile à cerner et un travail d’analyse de ses fondements s’avère nécessaire pour en faire le meilleur usage, l’utiliser à notre avantage et faire rayonner la France. Faire une marque, c’est raconter une histoire, le fameux storytelling dont on a tant parlé ces dernières années.

Or si l’Histoire façonne la France et permet de raconter une histoire, il manque à la France un récit économique. Si la marque est un concept marketing, c’est donc bien un concept économique, générateur de valeur matérielle et immatérielle. Or l’économie est le parent pauvre de notre pays. L’histoire économique de la France a pourtant aussi ses héros qui se nomment Fouquet, Colbert ou encore Vauban (on connaît celui des forteresses mais sait-on qu’il est aussi à l’origine de la comptabilité nationale ?). Avec eux et d’autres, Philippe Lentschener dégage les piliers de la marque France, l’amour des gestes et du savoir faire (sa description du point sellier d’Hermès vous donnera envie de vous précipiter rue du Faubourg St Honoré pour acheter le premier porte-cartes venu), une volonté de donner du sens à l’action, d’accompagner ses actes d’une vision, d’une inspiration (ce n’est par hasard que le design français qui fait rimer dessin et dessein est l’un des plus reconnus dans le monde), enfin l’art de la surprise, de ne jamais être là où l’on nous attend, d’inventer. La liste des inventions made in France serait tellement longue qu’une chronique dans Cominmag n’y suffirait pas. Retenons quand même que notre pays a vu naître l’aspirine, la crème solaire et le soutien-gorge moderne. N’est-ce pas là la meilleure preuve de notre créativité ?

[ASIDE]

Marque France de Philippe Lentschener est publié aux éditions du Cerf

Ancien président de Saatchi & Saatchi Paris, Publicis France et du groupe McCann Erickson, crPhilippe Lentschener a été nommé, en 2013, président de la mission gouvernementale pour la marque France. Il intervient fréquemment sur les chaînes I-télé, Public Sénat et BFM business dans les experts de l’éco et sur France 24 dans la semaine de l’économie. Il est considéré aujourd’hui comme l’un des très rares spécialistes en marque nationale. Marque France est son troisième livre après La nouvelle renaissance et L’odyssée du prix.

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